LE PAPE FRANÇOIS ET LE TERRORISME : UN OPPORTUNISME RELIGIEUX TENDANCIEUX




C’est initialement en lisant le dernier blogue de Richard Martineau que le sujet m’a d’abord intéressé. Mais ce qui m’a convaincu de produire cet écrit est la position du Pape François face au terrorisme. Lors de la traditionnelle bénédiction pascale urbi et orbi, le Pape François a invité les fidèles réunis à la Place Saint-Pierre de Rome en ces termes : « Avec les armes de l’amour, Dieu a vaincu l’égoïsme et la mort; son fils Jésus... lequel, par sa résurrection, a vaincu le mal et le péché... est la porte de la miséricorde grande ouverte à tous. »



Lorsque j’ai soutenu ma thèse de doctorat en théologie pratique, obtenue de l’Université de Montréal, ma directrice de doctorat a compris le point nodal de celle-ci à cette défense même, et ce, au grand dam de l’assistance. Je m’apprêtais à être docteur en théologie pratique, mais j’étais déjà, et aussi, philosophe et psychologue. D’abord, permettez-moi de clarifier de quoi il est question lorsque nous parlons de théologie pratique par rapport à biblique et dogmatique. La théologie pratique vise, à travers les Écritures, plus spécialement le Jésus historique comme il est dit, l’intégration de vérités existentielles intemporelles dans le quotidien de l’homme et de la femme de nos sociétés postmodernes. Le but de la théologie pratique est de guider la foi; la foi étant l’émergence d’un vécu réfléchi, d’un raffinement de l’esprit, de plus en plus vertueux, conduisant vers la Liberté, la Vérité, la Sagesse vers une existence qui soit Présence. Elle est un dépassement de soi par soi. Ainsi transformé, un tel être se tient prêt à accueillir et à aider son prochain à se transcender lui-même; ainsi se transmet la foi, soit de façon pragmatique et empirique, jamais par enseignement ni par adhésion.

AFFIRMATION 88

Selon Hegel, l’âme purifiée des impuretés de l’enfance est le fruit d’une évolution dialectique naturelle de l’esprit, au départ brute; l’âme se raffine.

AFFIRMATION 331

Ce n’est que lorsque cette possibilité de Liberté s’est réalisée que la Volonté, une volonté éclairée, advient.

Il importe également ici de clarifier sur la notion d’existence humaine. Toute existence humaine comporte trois dimensions inextricables en interrelation constante dans le temps : le spirituel ou l’immatériel, ce qu’il est convenu de nommer l’âme (les significations), le psychologique ou agitations de l’âme (les émotions) et le physique (les réactions corporelles). Ce que ma directrice de doctorat a compris ce soir de soutenance de ma thèse est le fait qu’il y a une quatrième dimension à toute existence: la dimension théologale. Une dimension résultant d’une existence vécue comme Présence. Or, une telle capacité de Présence est le fruit d’une existence dont l’âme a été purifiée, grâce à l’acquisition du mental, voire de la capacité de rationalisation, des limites illégitimement et inévitablement héritées de l’enfance. D’où le « quitte ton père, ta mère, tes frères, ta ville, ton village » de Jésus ainsi que le « retourner chez soi » des orientaux à comprendre non pas au plan physique, mais spirituel. Laquelle existence tend, dès lors, vers une vie de plus en plus vertueuse subordonnée à un choix délibératif éclairé portant sur le bien, le bon, le beau mettant ainsi fin au fait de subir les limites imposées de l’enfance.


Une existence ainsi libérée devient Présence et Liberté étant donné que l’âme, cette dimension spirituelle de l’existence, n’est plus assiégée par aucun affect négatif limitatif dans notre capacité à entrer en relation avec le Monde : êtres et choses. Bref à vivre la plénitude avec la multitude où la co-existence atteint son plus haut niveau d’être-avec-autrui et tend vers l’accueil inconditionnel de cet autre, vers la Vérité de l’Être. À noter que la présence, toujours limitative, qui précédait à l’accession à la Présence ne doit jamais être considérée en termes de culpabilité, mais uniquement au plan limitatif, les parents donnant toujours leur meilleur. Socrate et Heidegger d’affirmer : « ... qu’il n’y a pas d’existence manquée. » Les affects négatifs, eux, étant de l’ordre de la méfiance, de la peur, du doute, de la rancune, de la honte, du ressentiment, de la jalousie, de l’envie, de l’insécurité, de la culpabilité, etc. Ce faisant, comme le passé est garant de l’avenir, le temps étant vécu simultanément, le futur n’est plus, d’avance, potentiellement entaché par le passé : survient dès lors l’état de non-dualité.

AFFIRMATION 99

Lorsque passé et futur n’ont plus d’emprise limitative sur le présent il devient Présent : voilà la quatrième dimension.

AFFIRMATION 46

La Liberté consiste en un rendez-vous perpétuel avec le Présent.

C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre le « péché originel » soit le péché de nos origines, une situation à laquelle nul n’échappe. Le mot péché signifiant ici le fait d’être « coupé de la lumière », cette lumière, lumière véritable, conséquente à une existence vécue comme Présence. L’étymologie du mot Dieu Dei ramenant à la fois à « briller » et « lumineux ». Incapable, de par notre naissance, la naissance étant subie, d’accéder naturellement et spontanément, à cette lumière véritable intrinsèque à la Présence, l’humain se perd dans toutes sortes de fuites, de lumières artificielles... y compris la religion, ce dans quoi Jésus ne s’est cependant pas perdu, car faut-il le rappeler, Jésus n’était pas un chrétien, le christianisme est apparu après sa mort. Jésus a peut-être vaincu le mal, mais son mal à lui, soit les traces limitatives que sa propre enfance avait laissées, personne n’y échappant. Pour contrecarrer ce fait ne le fit-on pas naître d’une conception virginale?

AFFIRMATION 77

Nous guérissons pour peu que nous nous séparons de notre enfance, d’ajouter Sénèque.

AFFIRMATION 286

Platon d’ajouter que la victoire sur soi-même est, de toutes les victoires, en même temps la première à réaliser et aussi la plus belle.

Tout le mal dont souffre l’humanité depuis 2000 ans témoigne de cet échec de Jésus. Le mal et le péché n’ont pas été éradiqués et ne le seront jamais, car si tel était le cas, nous ne serions pas à parler de terrorisme. Ce que Jésus a réussi, c’est son enseignement, se prédication, sa vie à lui... au prix de celle-ci d’ailleurs. Ni Jésus ni Mahomet n’ont réussi, disons universellement, à imposer leur vision du monde : « Ne vous faites pas d’image de moi », disait le Nazaréen. Affirmer que Jésus a vaincu le mal par sa résurrection c’est dénaturer les faits. Utiliser un tel langage c’est maintenir les gens dans l’obscurantisme. Combien de fidèles savent ce que signifie réellement résurrection? Péché? Très peu, car très peu ont suivi des cours d’exégèse, laquelle science consiste en l’étude approfondie et critique d’un texte, bref de le restituer dans son contexte historique. Jésus est bel et bien mort, ce qui a ressuscité de lui c’est sa vision du monde, toute une vision! C’est cette vision qui a été récupérée, utilisée par la religion pour asservir, pour dominer et ainsi rendre dépendant. C’est une conséquence de la dépendance de fausser les choix, d’éradiquer la capacité de décider par soi-même. Dieu n’est pas de l’ordre de la croyance, ni de la transcendance, il est à faire par notre Présence de même que c’est lui qui nous fait par cette Présence. Dieu est gestalt entre ma quête d’être-humain dans son apothéose qui rencontre cette même quête d’être chez mon « prochain » comme l’enseigne la parabole. Dans son fondement transcendantal, lequel mot veut dire « au-delà... qui n’a pas de réalité comme telle », la religion s’éloigne du monde de l’humain. Surtout si l’on considère que la « réalité » du monde de telle ou telle transcendance peut avoir comme finalité l’impossible, l’irrationnel, l’utopique, la folie.

AFFIRMATION 114

C’est une caractéristique possible de l’existence humaine, être là tout en étant ailleurs.

AFFIRMATION 330

Si nous voilons notre histoire, d’affirmer Jaspers, elle vient nous surprendre à notre insu.

Si la raison est utilisée en éloignant de la réalité concrète que le monde nous présente il y a lieu de se questionner. Certes, c’est un triste constat de voir tant de souffrance dans ce monde, mais comprenons que cela a été de toujours et sera pour toujours. Lorsque l’on demandait à Jésus : « C’est pour quand le Royaume des cieux? »... Il est déjà là et pas encore là ... nul ne connaît ni l’heure ni le jour. Le Royaume des cieux réfère à la notion d’espace, quant au Règne de Dieu, il réfère à la notion de temps d’où cette quatrième dimension, l’espace-temps, une existence vécue comme Présence ici, maintenant, où le temps est vécu comme éternité. Dire que Dieu, par son fils Jésus, est « la porte de la miséricorde grande ouverte à tous » dans un contexte où nombre d’humains sont ponctuellement sujets à la peur et à l’angoisse, frôle l’opportunisme religieux. La porte qui peut ouvrir à la dimension théologale est celle qui s’ouvre conséquemment lorsque l’épreuve, épreuve personnelle faut-il le préciser, surgit dans notre existence, dans notre vie à nous : la foi, véritable, s’acquiert et se transmet de façon empirique, jamais par adhésion. Ainsi, « ce n’est pas ceux qui disent Seigneur! Seigneur! qui seront sauvés ». Matthieu de dire : « ... mais étroite est la porte, resserré le chemin qui mènent à la vie et il y en a peu qui les trouvent ». Un opportunisme papal basé sur une vision utopique, idéaliste du monde. Certes le péché originel est universel, mais la résurrection est individuelle et potentiellement réalisable ici, maintenant, de notre vivant. Pourquoi? Parce que ressusciter signifie initialement « se relever » de quelque chose, au départ, qui a fait en sorte de nous faire éloigner de la Présence. Être ressuscité, en second lieu, c’est avoir intégré sa mort physique avant même qu’elle ne survienne, bref de nous être extirpé de notre condition de mort-vivant. Voilà de quelle situation nous pouvons ressusciter! Mes quelques kilos de fragments de poussière d’étoiles étant la suite de 13,7 milliards d’années de vécus ininterrompus, je n’ai donc jamais été mort, en quoi la mort peut-elle faire peur dès lors? Tout cela sans avoir désormais besoin d’adhérer à une religion quelle qu’elle soit parce que dans un tel contexte la quatrième dimension, dimension théologale, est atteinte. À bien des égards, François et moi pensons probablement la même chose sur la question théologique. Cependant, je n’ai pas besoin de m’identifier à une religion pour en parler. Qui plus est, c’est de façon empirique, par un accueil inconditionnel que je transmets la foi à mes patients. Comment? En tout premier lieu en les amenant à se faire confiance, et ce, en les faisant se libérer des traces limitatives héritées de l’enfance. Bref se vaincre soi-même avant de vaincre le Monde.

AFFIRMATION 42

L’éternité n’est pas infinité de la durée, mais une coïncidence absolue avec le monde, êtres et choses.

AFFIRMATION 352

La réponse pour l’accès à la Liberté n’est pas à chercher dans les livres, les sectes ou quelconque mouvement religieux, elle est en soi.

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